Depuis que nous avons pris la décision de déménager en ville, plusieurs me regardent d’un air interrogatif. On me demande pourquoi on a fait une telle chose. J’ai entendu : «C’est mon rêve, la vie à la campagne», «vous aviez une si belle maison», «la ville, ça pue !», «ce n’est pas un endroit pour élever un enfant». On se demande pourquoi on redevient locataire ? Pourquoi pas la banlieue ? Bien sur, ces phrases et ces questions me tournent dans la tête et je mijote afin de mieux comprendre nos motivations. Voici l’état de ma réflexion.

L’endroit. Notre belle maison était située en haut d’une grande côte, sur un cul-de-sac en gravelle. En bas de la côte, il y a une route assez passante où il n’est pas agréable de marcher. Il y a bien un lac à 10 minutes de marche, mais il est entouré de terrains privés et il est impossible d’y mettre l’orteil. Pas de sentiers à moins de prendre la voiture. Parlant de voiture : 10 minutes pour l’épicerie, 15 minutes pour Saint-Jérome et 50 minutes pour Montréal. La conséquence de ces distances : Peu d’amis viennent nous visiter, il nous faut deux voitures et quand on «va en ville», on y passe nécessairement la journée parce qu’on a accumulé une longue liste de commissions. Si vous voulez vivre à la campagne, choisissez bien l’emplacement.

L’ennui. La campagne est l’endroit idéal pour relaxer quand on mène une vie mouvementée. À l’époque où travaillais souvent sur la route, où je visitais plusieurs régions du Québec et je rencontrais des tas de gens, j’aimais revenir à la maison et profiter du calme de la campagne qui faisait contraste avec ma vie professionnelle. Le travailleur autonome que je suis devenu s’emmerdait royalement dans son petit bureau, en pyjama toute la journée avec son accès internet par satellite. Même chose pour Sophie, qui a beaucoup diminué ses activités professionnelles depuis qu’Agathe est avec nous.

L’argent. Devenir locataire peut sembler étrange, mais on voulait être installé confortablement et les maisons sont trop chères à Montréal. À mes yeux, pour être heureux en ville, il faut être bien logé et bien situé. La location nous offre la solution sans tracas. Pas de rénovations, pas d’entretien et toutes les fins de semaines libres pour voyager avec Raoul. L’autre aspect monétaire important, c’est les bagnoles. Une voiture de moins, ça paraît beaucoup dans le budget. Sans parler de l’essence et de tous les frais associés à de hauts kilométrages.

La famille. Honnêtement, je n’avais pas envie de voir Agathe grandir toute seule sur sa montagne. Faire 30 minutes d’autobus jaune pour aller à l’école. J’ai vécu mon enfance dans une banlieue qui n’était pas desservie par les transports en commun… c’est désagréable pour un jeune d’être dépendant de ses parents pour toute forme de déplacement. L’autre aspect important est d’actualité présentement : Sophie avait envie de rester à la maison avec Agathe… et je pense qu’Agathe avait envie de passer ses journées avec sa maman. Étant deux travailleurs autonomes, nous ne pouvons compter que sur nous pour subvenir aux besoins de la famille. Plutôt que de devoir travailler comme des fous pour payer la maison et son entretien, les voitures et la garderie, on a fait le choix de réduire les dépenses et de mettre notre fille au centre de nos vies. On pouvait le faire et on avait envie de le faire… alors, go !

La business. Ma clientèle est principalement en ville, celle de Sophie aussi.

La nature. J’aime la nature. Je suis le plus heureux des hommes auprès d’un feu de camp, dans un canot ou en randonnée… Des choses que je ne faisais pas plus souvent à partir de ma maison de campagne que de tous les autres endroits où j’ai habité. En plus, on a Raoul, le plus merveilleux des véhicules pour s’évader et aller dormir sous les étoiles.

La culture. Si vous me lisez depuis quelque temps, vous savez que j’aime aller voir des spectacles, aller au cinéma et manger au restaurant. Ici, je feuillette le Voir et je deviens fou. Y a tellement de choses à voir à Montréal, tellement d’activités, tellement de vie.

La vie sociale. Bien de gens s’installent en campagne pour s’isoler. Ils ont mené une vie active, approchent de la retraite et achètent la maison la plus éloignée, celle qui est derrière les plus gros arbres. Ils y vivent tranquillement, sans déranger personne. Difficile d’avoir une vie sociale dans un tel contexte. Moi, je n’ai pas envie de vivre comme un ermite, j’ai envie de souper avec des amis, de rencontrer des gens, de voir de l’action.

Si un jour je retourne vivre en campagne ce sera fort de cette expérience et j’y irai certainement d’une tout autre façon.

Qu’en pensez-vous ?